Aller au contenu
Retourner aux dossiers

Les thérapies ciblées, des traitements contre le cancer

Comme son nom l’indique, une thérapie ciblée est un traitement capable de cibler spécifiquement les cellules anormales. Une cellule anormale est une cellule qui est reconnue comme étant différente des autres cellules, ou une cellule qui utilise un mécanisme connu de la cellule normale mais de façon très exagérée et en devient ainsi totalement dépendante. Utilisées principalement en oncologie, les thérapies ciblées s’attaquent de préférence aux cellules cancéreuses, en repérant chez elles une cible précise, une anomalie. Elles ont pour effet de freiner la progression de la maladie voire de faire régresser la tumeur, en agissant spécifiquement sur les mécanismes qui permettent aux cellules tumorales de proliférer. Développées au début des années 2000, ces nouvelles thérapies sont considérées comme une petite révolution dans la prise en charge des cancers (1).

18 millions

Plus de 18 millions de nouveaux cas de cancers et 9,86 millions de décès sont recensés chaque année dans le monde (2).

Chaque cancer est associé à des mécanismes moléculaires qui lui sont propres. Grâce aux progrès de la recherche, les scientifiques découvrent de plus en plus de nouveaux mécanismes moléculaires qui, au sein des cellules cancéreuses ou des cellules de l’environnement tumoral, soutiennent la croissance de la tumeur et/ou à sa propagation dans l’organisme. Ces découvertes permettent de développer de nouveaux types de thérapies ciblées permettant de traiter de plus en plus de formes de cancers.

Le mode d’action des thérapies ciblées diffère selon les caractéristiques de la maladie et les effets recherchés.

  • Certaines agissent directement sur les cellules cancéreuses pour bloquer spécifiquement un processus tumoral, grâce à l’action de molécules dites « inhibitrices ». De petite taille, ces molécules peuvent par exemple bloquer, à l’intérieur des cellules cancéreuses, les mécanismes stimulant leur division et leur prolifération de façon anarchique, en interférant sur les signaux qui stimulent la multiplication cellulaire.
  • D’autres thérapies agissent quant à elles sur des cibles présentes dans l’environnement des cellules cancéreuses ou encore à la surface des cellules cancéreuses, grâce aux anticorps monoclonaux. Ces grosses molécules privent les cellules cancéreuses des éléments dont elles ont besoin pour se développer, ou active de façon sélective sur la cellule cancéreuse le processus naturel de destruction cellulaire. Elles peuvent par exemple limiter voire empêcher la fabrication des vaisseaux sanguins qui alimentent la tumeur (agents angiogènes) et interviennent, de ce fait, dans sa croissance.

Avec les thérapies ciblées, les médecins disposent ainsi d’un nouvel arsenal thérapeutique contre les cancers. Elles peuvent être combinées aux traitements conventionnels (chirurgie, radiothérapie, chimiothérapies), pour détruire les cellules malades et faire régresser la tumeur, ou à l’hormonothérapie pour traiter les cancers hormonodépendants (comme certains cancers du sein).

La transformation d’une cellule normale en cellule cancéreuse résulte d’une altération de l’ADN (mutations, translocations, amplifications, délétions/insertions…). Aussi, l’éligibilité d’un patient à une thérapie ciblée repose sur les caractéristiques moléculaires des cellules tumorales, et non sur la localisation de la tumeur. Dès lors, un même type de cancer chez différents patients ne sera pas systématiquement traité avec une thérapie ciblée. Inversement, un même médicament de thérapie ciblée peut être prescrit pour des types de cancers très différents, sous réserve qu’ils présentent le même profil moléculaire.

Pour savoir si la prescription d’une thérapie ciblée est appropriée, un ensemble de tests moléculaires est donc indispensable. Ces tests permettent, d’analyser l’ADN de la cellule cancéreuse (collecté par biopsie tumorale ou prélèvement sanguin) et de rechercher des anomalies génétiques pour lesquelles une thérapie ciblée peut fonctionner.

La cible peut alors être directement l’anomalie génétique découverte ou le mécanisme moléculaire qui est stimulé par l’anomalie génétique. Si la cible d’un médicament de thérapie ciblée est trouvée, le patient peut alors bénéficier de l’action de cette thérapie.

La prescription d’une thérapie ciblée est personnalisée selon les caractéristiques moléculaires de la maladie et les effets recherchés.

Les petites molécules inhibitrices,ayant pour objectif d’agir directement sur les cellules cancéreuses, sont le plus souvent administrées par voie orale, sous forme de comprimés.

Les anticorps monoclonaux, dont la mission est d’agir sur l’environnement des cellules cancéreuses ou à leur surface, sont quant à eux administrés sous forme d’injection, intraveineuse ou sous-cutanée.

La durée du traitement dépend du type de cancer et du type de médicament(s) prescrit(s). Afin d’opter pour la meilleure stratégie thérapeutique contre le cancer à traiter, l’oncologue prendra en compte l’état de santé du patient, son âge et son environnement. À la fin du traitement, des examens permettent d’en mesurer l’efficacité. La suite de la prise en charge du patient dépendra de ces résultats.

Les thérapies ciblées fonctionnent différemment des chimiothérapies conventionnelles, qui détruisent toutes les cellules en division rapides dans l’organisme (les cellules cancéreuses comme les cellules normales). Les chimiothérapies peuvent souvent provoquer des effets secondaires lourds, tels que nausées, vomissement, diarrhée, fièvre, infection, ainsi qu’une fatigue intense et la perte de cheveux.

Les thérapies ciblées, quant à elles, s’attaquent plus spécifiquement aux cellules porteuses de l’anomalie moléculaire ciblée et épargnent davantage les cellules saines. Néanmoins, ces thérapies ne sont pas dépourvues d’effets indésirables qui varient selon le type de médicament (et son mécanisme d’action) ciblant les cellules cancéreuses : fatigue, troubles gastro-intestinaux (vomissements, diarrhées), problèmes cutanés ou métaboliques, hypertension…

De plus en plus de thérapies ciblées sont intégrées dans le traitement de référence de certaines formes de cancer (3).

1/3

Aujourd’hui, 1 médicament anticancéreux sur 3 est une thérapie ciblée (4).

Ces thérapies sont porteuses d’espoir pour les patients dans les années à venir. D’autant que, grâce aux avancées de la recherche et à une meilleure compréhension des mécanismes responsables du développement des cellules cancéreuses, l’identification de nouvelles cibles thérapeutiques et la mise au point de nouvelles thérapies ciblées ne cessent de progresser.

Les thérapies ciblées, au cœur de la médecine de précision

Complétant l’arsenal thérapeutique conventionnel existant contre le cancer (chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie), les thérapies ciblées et l’immunothérapie font partie de ce qu’on appelle la « médecine de précision ». Basée sur une meilleure connaissance des mécanismes biologiques conduisant à l’apparition et au développement des tumeurs, la médecine de précision a pour objectif de proposer à chaque patient atteint de cancer un traitement personnalisé, adapté aux anomalies de sa tumeur.

Les plateformes de testing de génétique moléculaire effectuent désormais des dizaines de milliers de tests chaque année pour caractériser et traiter le plus finement possible chaque patient. La médecine de précision ne pourra que progresser dans les années à venir, avec l’arrivée de nouvelles thérapies ciblées, mais aussi de nouveaux médicaments complexes servant de vecteurs pour conduire et déposer une chimiothérapie au sein de la tumeur, le développement de l’immunothérapie, l’identification de nouveaux biomarqueurs ou l’intelligence artificielle, capables de prédire l’évolution de certains cancers et d’orienter la prescription des bons traitements au bon patient et au bon moment…


Sources

(1)  Journal of Thoracic Oncology, MS21.04 Targeted Therapy – The Second Revolution, 2018
(2) Globocan, 2020
(3) Shahid K, Khalife M, Dabney R, Phan AT. Immunotherapy and targeted therapy—the new roadmap in cancer treatment. Ann Transl Med 2019;7(20):595. doi: 10.21037/atm.2019.05.58
(4) French National Cancer Institute, 2022.