Par Maximilien Schoen
À 20 ans, on pense avoir toute la vie devant soi. J’en avais la certitude. Voyager, c’était ma passion, ma carrière et ma vie. Mais en 2023, j’ai soudainement été frappé par la maladie, m’engageant dans un combat que je ne n’aurais jamais imaginé. Je m’appelle Max et voici mon histoire : mon parcours face à la leucémie, ma survie et mon retour à la vie.
Une vie de liberté et d’aventure
J’ai toujours été un voyageur dans l’âme. Ma passion pour l’exploration du monde a commencé en 2008, lorsque j’ai rendu visite à mon frère en Australie avec ma mère. Ce voyage a éveillé quelque chose en moi : l’envie d’en voir plus, d’aller plus loin, d’explorer sans cesse.
À la fin de mes études en Allemagne, j’ai commencé à travailler pour une compagnie d’assurance. Cependant, je me suis vite rendu compte que le monde de l’entreprise n’était pas fait pour moi. Je rêvais d’aventure, de liberté et d’une vie sans routine. C’est ainsi qu’en 2019, à la fin de mon contrat, j’ai tout quitté pour voyager.
Pendant les deux années qui ont suivi, j’ai vécu mon rêve. Avec un ami, j’ai parcouru 17 pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique centrale. Chaque jour m’offrait une nouvelle expérience : des cultures différentes, de nouveaux paysages et des rencontres inoubliables.
De retour chez moi, je savais que je ne pourrais pas rester longtemps inactif. J’ai développé ma propre activité en ligne, en partageant des conseils de voyages sur YouTube et les réseaux sociaux, tout en continuant de parcourir le monde. Ma vie se déroulait exactement comme je l’avais imaginée : imprévisible, passionnante et pleine de possibilités.
Puis en 2023, tout a basculé.
Les premiers signes – le moment où tout a commencé à changer
Après un an en Asie, je suis retourné en Europe au printemps 2023. Je venais juste de fêter mes 30 ans en avril. Quelques semaines plus tard, je suis parti en Sicile, avec l’intention de parcourir l’Italie, puis de me rendre en Grèce et en Albanie.
C’est à ce moment-là que les premiers symptômes sont apparus. Au départ, il s’agissait juste de manifestations légères : perte d’appétit, mal de gorge, quelques boutons sur la peau. Rien d’alarmant. J’avais déjà été malade lors de précédents voyages ; cela faisait partie des risques.
Les amis qui m’avaient brièvement rejoint en vacances en Sicile devaient rentrer en Allemagne. J’avais pour ma part décidé de prolonger mon séjour, en espérant me rétablir seul. Mais cette fois, c’était différent. Ma fièvre empirait. Mes genoux commençaient à me faire si mal qu’il m’était quasiment impossible de marcher. Mon état se détériorait rapidement. Je pouvais à peine bouger. Un ami de la région m’a aidé à me procurer des médicaments, mais le soulagement n’a été que temporaire. Lorsque j’ai dû changer d’appartement, je me souviens que la femme de ménage m’a aidé à descendre les escaliers – je ne pouvais même pas porter mon sac à dos. C’est à ce moment-là que j’ai su que quelque chose n’allait vraiment pas.
Le retour difficile en Allemagne
En Italie, je me suis rendu aux urgences, dans l’espoir d’obtenir des réponses. À la place, on m’a donné des antibiotiques et renvoyé chez moi, sans prise de sang et sans véritable diagnostic. Ma fièvre continuait d’augmenter. Je grelotais, je me sentais épuisé et à bout de forces.
Un soir, tout a basculé. Je me suis évanoui sous la douche, je suis tombé violemment au sol en brisant la porte vitrée. Mes blessures ont gonflé en l’espace de quelques secondes. C’est mon frère, arrivé la veille en Italie, qui s’est occupé de moi ; il savait qu’il fallait agir maintenant.
À ce moment-là, j’étais trop faible pour réfléchir. Nous avons simplement réservé le premier vol pour rentrer. C’est à peine si je me souviens d’être arrivé à l’aéroport. Je portais un masque, j’essayais de paraître normal, tout en craignant que la sécurité ne me laisse pas monter à bord vu mon état. En Allemagne, mes parents sont venus nous chercher à l’aéroport et nous sommes allés directement à hôpital.
Entendre l’impensable : « Vous avez une leucémie »
L’équipe médicale a effectué une analyse de sang. Au départ, il n’y avait qu’un médecin, puis deux, puis sept. J’ai compris à leurs visages qu’il y avait quelque chose de grave.
« Vous avez une leucémie ».
Cela n’avait aucun sens. Un cancer ? Moi ? Impensable. Je vivais mon rêve, je parcourais le monde. Comment cela pouvait-il être possible ?
Lorsque mes parents, mon frère et moi avons appris le diagnostic, nous étions complètement dévastés.
Puis la réalité m’a rattrapé : si j’avais attendu ne serait-ce que quelques jours de plus, mon corps n’aurait probablement plus été en mesure de lutter. Il fallait agir vite.
J’ai immédiatement été transféré dans un centre hospitalo-universitaire et, en quelques jours, mon état s’est dégradé. Je me souviens ensuite m’être réveillé après 19 jours de coma artificiel, dans lequel l’équipe médicale m’avait placé en raison de mon système immunitaire gravement affaibli et de mes poumons infectés.
Le coma, la chimiothérapie et le combat pour ma vie
Se réveiller d’un coma, c’est comme revenir à la vie dans un corps que vous ne reconnaissez plus. Je ne pouvais plus bouger. Mes muscles avaient fondu. Tout mon corps était gonflé par les médicaments. J’avais même des difficultés à déglutir.
J’ai dû tout réapprendre : respirer, bouger, m’asseoir, fonctionner. Cependant, je n’avais que peu de temps pour intégrer ce qui s’était passé, car une autre bataille m’attendait : la chimiothérapie.
Dès le début, j’ai fait un choix : ne pas aller voir sur Internet les effets secondaires. Je ne voulais pas vivre dans la crainte en attendant que les choses tournent mal. Si quelque chose devait arriver, j’y ferais face le moment voulu. Mais pas question de me laisser submerger par l’angoisse.
Lors de la première séance, j’ai dû rester à l’hôpital en observation pour surveiller comment mon corps réagissait à la chimiothérapie. Ensuite, chaque cycle suivait le même schéma épuisant : je passais cinq jours à l’hôpital pour le traitement, puis plusieurs semaines à domicile pour tenter de recouvrer mes forces avant la séance suivante. Les deuxième et troisième semaines ont été les plus difficiles. Mon système immunitaire s’est effondré et je devais me rendre chez le médecin tous les jours pour effectuer des transfusions sanguines.
J’ai perdu mes cheveux, mon autonomie, le contrôle de ma vie. En revanche, j’ai toujours gardé l’envie de me battre.
Se reconstruire après un cancer : un nouveau départ
Fin 2023, ma chimiothérapie s’est terminée – une bataille qui a duré six mois, mais dont je suis venu à bout. Début 2024 est arrivé le temps de la reconstruction – physique, mentale et émotionnelle.
J’ai recommencé à voyager, avec prudence, en me cantonnant à l’Europe. Mon objectif principal était de me rétablir. Mon corps guérissait plus rapidement que prévu. Plus important encore, j’ai pris conscience que j’avais gardé ma force mentale. Le cancer m’a défié, mais ne m’a pas vaincu.
Ce que je souhaitais, avant tout, c’était partager mon expérience pour amener à une prise de conscience. Si je pouvais faire passer un message, ce serait celui-ci : personne ne s’imagine que cela pourrait arriver, jusqu’au jour où le diagnostic tombe. C’est pourquoi je soutiens aujourd’hui les dons de sang et de moelle osseuse. Si vous avez déjà songé à donner votre sang ou votre moelle, faites-le. Cela pourrait permettre de sauver une vie.
Je voulais également apporter ma contribution d’une autre manière : en racontant mon histoire. Partager mon expérience sur YouTube et les réseaux sociaux m’a permis de toucher des personnes traversant une situation similaire. J’ai reçu de nombreux soutiens et le fait de savoir que mon témoignage pouvait aider a été très important.
Le cancer m’a pris beaucoup de choses : ma force, ma liberté, le sentiment d’être invincible. Mais en retour, il m’a offert quelque chose : une perspective.
Je ne considère plus rien comme acquis. Chaque jour est un cadeau. Chaque étape de ma vie, chaque voyage, chaque moment passé en famille, tout cela compte beaucoup plus pour moi aujourd’hui. Je ne sais pas de quoi l’avenir sera fait, mais je sais une chose : le cancer ne m’a pas brisé. Il m’a rendu plus fort. Désormais, je vis pleinement ma vie, un jour après l’autre.